Cavilove

Cavilove Cavalier King Charles Spaniel

Cavalier King Charles Spaniel

Le cavalier King Charles : l'histoire

Le cavalier King Charles : l'histoire

Formant avec le King Charles le duo des épagneuls nains anglais, le cavalier King Charles spaniel, le plus répandu des deux, illustre particulièrement bien un des processus ayant façonné la raciation canine, qui n’a pas le caractère de linéarité qu’on lui accole parfois a posteriori : bien des populations, variétés, types canins ont pu s’éteindre puis éventuellement renaître sous l’effet de nouvelles pressions sélectives et recombinaisons.

Compagnons favoris des dames

La race cavalier King Charles est ainsi une création récente, mais avec une filiation historique bien plus ancienne que la cynophilie. 

L’usage de garder près de soi des chiens de taille réduite comme animaux d’agrément se rencontre notamment dans l’Antiquité gréco-romaine avec les petits chiens dits « de Melita » (nom de l’île de Malte et de celle de Mjlet au large de la Croatie actuelle). 

Attributs de l’élite sociale, avec un statut privilégié par rapport aux variétés canines purement utilitaires, ce sont donc des marqueurs de caste.

Au Moyen-ge, une version nanifiée de  l’épagneul apparaît en Europe de l’ouest, sa large répartition s’expliquant par l’homogénéité de cette sphère de civilisation ; l’aristocratie chevaleresque y partage la même culture et des liens de parenté. Il est donc difficile d’attribuer à ces chiens un pays d’origine en particulier.

La France ferait toutefois une bonne candidate : les représentations enluminées de chiens dont l’aspect laisse penser à de probables épagneuls nains, y sont a priori les plus précoces, à partir de la fin du XIIIe siècle, et pays alors le riche et le plus peuplé d’Europe, elle est au Moyen-ge en position de leader culturel.

Mais même si c’était en France qu’aurait d’abord émergé des épagneuls nains, cela n’impliquerait assurément pas que tout le cheptel européen y trouverait sa source : une pratique culturelle peut voyager, mais pas forcément son objet lui-même ; on a pu favoriser en différents endroits la nanification de certains épagneuls

En amont de ces petits épagneuls de compagnie, il y a l’épagneul de taille moyenne. Il est dédié à débusquer les oiseaux pour leur capture au filet, version roturière de la chasse à la plume, ainsi que pour sa version aristocratique, la volerie, où il lève les volatiles avant que les rapaces dressés soient envoyés les coiffer. Il chasse aussi le lapin ; il est probable qu’au Moyen-ge, des sujets de petite taille ont servi dans un premier temps à cette chasse, même si le rôle du chien consiste alors en général à débusquer l’animal et à le faire rentrer au terrier où l’on envoie ensuite le furet dressé.

Mais à partir du moment où des sujets de taille réduite ont eu également une fonction de chiens d’agrément - le tempérament très affable de l’épagneul, déjà salué au Moyen-ge, ayant sans doute joué un rôle dans cette attribution -,  l’attrait représenté dans ce contexte par leur taille a conduit probablement à les nanifier davantage. Il n’est pas exclu, les populations canines ne vivant pas aux ères précynophiles dans l’isolement reproductif, que l’obtention d’épagneuls nains doive quelque chose à l’apport d’autres petits chiens.

On pense aux successeurs probables des Mélitéens, présents dans l’Empire byzantin, qui se prolongent au Moyen-ge dans la péninsule italienne pour aboutir aux bichons. Devant une représentation rudimentaire, il peut être difficile de trancher entre les uns et les autres, mais à partir de la fin du Moyen-ge l'iconographie permet de différencier nettement les bichons (au poil bien long y compris en tête), et les épagneuls nains, les plus fréquemment représentés en compagnie de femmes de l’aristocratie puis aussi de la bourgeoisie urbaine. 

En effet, si sur les monuments funéraires antiques, les petits chiens de compagnie étaient montrés auprès de figures féminines, masculines ou de couples, à partir du Moyen-ge ils deviennent un attribut plus spécifiquement féminin. En français, l’épagneul nain est dit chien « dameret », c’est à dire de « de dame ». A la Renaissance puis à l’âge classique, il fait partie de l'indispensable panoplie des femmes des élites sociales dont il partage intimement l'existence. Il peut être en complément le compagnon de jeu de leurs enfants. 

A partir de la Renaissance et jusqu’au XVIIIe siècle, l’épagneul nain, au regard de sa présence dans l’art pictural, apparaît comme le petit chien de compagnie le plus répandu. De nombreux peintres le représentent dans des scènes religieuses, domestiques, et des portraits ; on les voit ainsi dans les bras, sur les genoux, ou aux pieds des dames. La taille vraiment minuscule qu’ils ont parfois dans l’iconographie médiévale ne doit sans doute pas être considérée comme une description réaliste, l’art de l’enluminure étant peu naturaliste ; il s’agit sans doute d’un code stylistique réservé à ces chiens. Mais à partir de la Renaissance on peut plus volontiers tabler sur des représentations inspirées de la réalité, et certains épagneuls nains semblent aussi fins et petits que les épagneuls nains continentaux actuels (Phalène et Papillon). 

Passion royale

Passion royale

Les représentations de petits épagneuls de compagnie se remarquent dans l’art anglais de l’enluminure à partir du XIVe siècle.

A la Renaissance, ils sont les favoris des dames de la cour des souverains Tudor. Dans son De Canibus Britannicis (1570), le tout premier traité cynologique, le Dr John Keys (alias Johannes Caïus), successivement médecin d’Edouard VI, de Marie Tudor et d’Elisabeth Ière, les mentionne. Se livrant à une classification fonctionnelle des chiens anglais, Caïus distingue plusieurs groupes ; celui des Délicati est consacré au Fotor  (du latin fotus, participe du verbe fovere qui signifie réchauffer), qu’il appelle aussi Meliteus, estimant ainsi qu’ils descendent des chiens mélitéens.

Il précise qu’on les désigne en anglais sous le nom de « Spaniel gentle or comforter », c’est à dire épagneul noble ou de réconfort. 

Caïus explique qu’il s’agit d’une « sorte de chien délicate, fine et jolie », mais en tant que censeur misogyne bien de son époque, il fustige sa présence auprès des dames : « ces chiens sont petits, jolis, propres et raffinés, et recherchés pour satisfaire la délicatesse des dames coquettes et dévergonder leurs volontés ; instruments de sottise avec lesquels elles jouent et badinent, gaspillent le trésor du temps, ôtent de leurs esprits des exercices plus recommandables, et satisfont leur concupiscence corrompue pour la distraction vaine. Plus ces poupées (ndlr : sens initial du mot anglais puppy, dérivé du français poupée) sont petites, plus elles suscitent de plaisir en tant que compagnons de jeux à des maîtresses maniérées afin d’être portés sur leur poitrine, leur tenir compagnie dans leurs chambres, dormir dans leur lit, être nourris de viande à table, être porté dans leur giron, lécher leurs lèvres et voyager dans leurs chariots. »

n apprend donc incidemment que les plus petites tailles sont particulièrement recherchées. Caïus trouve cependant une utilité à ces chiens : leur chaleur apaise les maux d’estomac, et il croit en outre que ce contact, par effet de transfert sur le chien, peut guérir certaines maladies (voir encadré Complément d’enquête). Il est probable, compte tenu de la faveur dont jouit le spaniel nain auprès des hautes dames, que le dernier chien, resté avec elle jusqu’à sa fin, de Marie Stuart, la reine d’Ecosse décapitée en 1587 sur ordre d’Elisabeth Ière, était de cette variété.

Le rapport officiel de l’exécution, rédigé par un témoin, Robert Wynkfield, et conservé au British Museum, mentionne ce détail tragique : « alors l’un des bourreaux, tirant ses jarretières, aperçut son petit chien qui s’était glissé sous ses vêtements, et qui ne put en être enlevé si ce n’est par la force. Après quoi il ne voulut pas quitter le cadavre, mais se coucha entre sa tête et ses épaules, qui étaient couverts de son sang. Il fut emporté et lavé comme toutes les autres choses ensanglantées ont été brûlées ou lavées. » 

La dynastie Stuart succède en 1603 à Elisabeth Ière sur le trône d’Angleterre, avec Jacques Ier, fils de Marie. Son successeur Charles Ier est portraituré en famille avec un spaniel nain ; c’est aussi le cas de son fils le futur Charles II (1630-1685), alors qu’il est encore un poupon; il apparaît qu’il a pu ainsi apprécier ces chiens depuis son enfance.

Après la guerre civile entre la Couronne et les parlementaires Puritains (branche radicale du calvinisme) menés par Olivier Cromwell, puis l’intermède républicain qui suit la défaite de Charles Ier et son exécution en 1649, Charles II, qui s’était réfugié en Hollande et en France, monte sur le trône en 1660. Le souverain se montre très attaché à ses chiens et à ses spaniels nains en particulier, qu’il loge dans sa chambre où les femelles mettent bas et allaitent leurs chiots, qui l’accompagnent partout même lorsqu’il préside les réunions de son conseil. Il promulgue un décret pour les faire admettre dans tous les lieux publics, même dans l’enceinte du Parlement où les animaux étaient jusqu’ici interdits - décret qui n’a par la suite jamais été abrogé.

Comme l’a été au siècle précédent le roi de France Henri III à propos de ses propres épagneul nains, Charles II Stuart est moqué et blâmé par certains de ses contemporains, non pour avoir possédé des petits chiens de compagnie, mais pour leur avoir montré un si grand intérêt, ce qui est jugé alors peu digne d’un homme et a fortiori d’un roi. Le secrétaire de l’Amirauté Samuel Pepys raconte dans son journal que le roi est accompagné « d’un chien qu’il adorait » sur le bateau qui le 25 mai 1660 l’amène à la reconquête du trône paternel. Pepys note sévèrement en 1667, alors qu’il assiste au conseil royal dans le palais de Whitehall : « tout ce que j’observe est la stupidité du roi, jouant avec son chien tout le temps, et ne se souciant pas des affaires. » 

Mais selon l’historien Thomas Macaulay (History of England, 1847), les plaisirs de ce roi, peu intéressé par les tâches gouvernementales mais connu pour aimer la nature et les animaux, n’étaient pas toujours sévèrement jugés : « il se levait tôt et passait trois ou quatre heures au grand air. Il pouvait être vu, avant que la rosée s’évapore de l’herbe du parc Saint-James, marcher à grandes enjambées au milieu des arbres, jouer avec ses Spaniels, lancer du grain à ses canards ; et ces exhibitions le rendaient sympathique au peuple, qui aime toujours voir les grands condescendre. »

Conséquence de cette royale attention dont ils font l’objet, l’habitude se prend à partir de cette époque de désigner les épagneuls nains anglais par le nom de King Charles Spaniel ou King Charles Dog - dénomination qui figurera dans la nomenclature des variétés canines établies par Carl von Linné dans son Systema Naturæ (1735). On en voit auprès de Jacques II (1633-1701), frère et successeur de Charles II. Alors qu’il n’était encore que duc d’York et amiral de la flotte royale au cours de la 2e guerre anglo-hollandaise en 1665, il est réputé avoir lancé, alors que son vaisseau était en feu : « sauvez les chiens ! » Puis, seulement après une pause : « et le duc de Monmouth ! » - le duc en question étant son neveu de 16 ans, James Scott. Dans une autre version de l’histoire, le personnage dont le duc d’York ne se soucie qu’après ses chiens est « le colonel Churchill ».

Ce John Churchill justement, le premier duc de Marlborough (1650-1722), brillant stratège de la guerre de Succession d’Espagne et héros à cette occasion de la vieille chanson française « Marlbrough s’en va-t-en guerre », possède une lignée qu’il utilise également à la chasse ; elle est donc assez peu nanifiée.


 

Un challenge cynophile

Un challenge cynophile

De robe blanche et orange, la plus fréquente dans l’iconographie de l’épagneul nain, elle sera connue sous le nom de Blenheim, un palais dans l’Oxfordshire où ses chiens sont élevés ; cette résidence a été construite sur des terres offertes par la reine Anne Stuart (fille de Jacques II), en guise de marque de reconnaissance pour les victoires remportées pendant la guerre, notamment celle de Blenheim en Bavière en 1704 contre les troupes du roi de France et du prince-électeur de Bavière. Les ducs de Marlborough continueront d’élever ces chiens comme une tradition familiale.

Les King Charles se maintiendront auprès de la bonne société britannique, puis seront progressivement concurrencés par d’autres petits chiens de compagnie, comme le carlin, un molosse nain (dont l’origine n’est vraisemblablement pas chinoise, mais c’est une autre histoire...), à la mode à partir du milieu du XVIIIe siècle des deux côtés de la Manche. 

Il impose ainsi, avec sa face plate, un nouveau canon esthétique. Les modifications céphaliques qu’entraînent la nanification sont notées au XVIIIe siècle dans L'Encyclopédie : « l'épagneul de la petite espèce a le nez plus court que le grand à proportion de la grosseur du corps. Les yeux sont gros et à fleur de tête » ; ces caractéristiques ont donc pu apparaître par la sélection des plus petits modèles sans forcément résulter de croisements, même si l’apport du carlin, bien que non documenté, ne soit puisse être exclu.

Le chanfrein des King Charles avait en tout cas commencé à raccourcir avant l’importation d’épagneuls japonais et pékinois. Mais à partir du moment où ils se retrouvent sur le sol anglais, il est très probable que ce soit leur apport, dans la seconde moitié du XIXe siècle, qui transforme drastiquement la tête du King Charles, menant à la race ainsi nommée actuellement. La contribution du Japonais est attestée par l’éleveur londonien Joseph Nave (cité par Vero K. Shaw, The Illustrated Book of the Dog, 1881) : « à travers l’introduction de l’épagneul japonais, les King Charles (...) ont gagné le front haut, le nez court et la mandibule saillante, ce qui est la nature du Japonais. »

Les sujets au nez long n’ont pas entièrement disparu - des peintres du XIXe siècle les représentent, notamment Landseer portraiturant le chien de la reine Victoria -, mais ils se sont raréfiés ; de nombreuses autres œuvres montrent la variété à nez court. Cette évolution n’est pas forcément du goût de tout le monde. Dans son livre The Dog  (1845), William Youatt, un des pionniers de la science vétérinaire moderne, la juge sévèrement : « la race King Charles actuelle est réellement altérée pour le pire. Le museau est presque aussi court, et le front aussi laid et proéminent que le plus authentique bulldog. La taille de l’œil a doublé, et a une expression de stupidité qui correspond trop fidèlement au caractère du chien. Comme il y a toujours l’oreille longue, le poil soyeux, et la belle couleur de robe, les vendeurs n’ont pas scrupule à demander 20, 30 et même 50 guinées. »

Histoire du Cavalier King Charles

Le vétérinaire Delabere P. Blaine rapporte (Encyclopedia of Rural Sports, 1840) que le duc de Norfolk élevait des King Charles noir et feu avec un soin jaloux, s’appuyant sur cette anecdote : alors que Blaine visite un jour le chenil de la duchesse d’York (belle-fille du roi George III), celle-ci lui montre un « vrai » King Charles que lui avait offert le duc de Norfolk et qu’elle considérait comme plus rare que ses carlins. Mais le duc avait peut-être craint que la duchesse mésuse de son cadeau, car elle confie au Dr Blaine : « croiriez-vous qu’il ait pu être si inélégant au point d’écrire qu’il devait obtenir, non ma promesse formelle, mais celle de mon mari, que je ne devais pas le faire reproduire ? ». Peu de temps après, Blaine rencontre la princesse Sophia de Gloucester, qui avait reçu un King Charles du duc de Norfolk, et qui lui raconte de même que son frère le prince avait du promettre au duc qu’elle ne le ferait pas reproduire. L’auteur Rawdon B. Lee (Modern Dogs, 1891) rapporte quant à lui qu’un ami du duc de Norfolk lui ayant demandé un chiot, celui-ci répondit : « laquelle de mes résidences voudriez-vous, monsieur ? »

Le Dr Youatt mentionne également les Blenheim spaniels, « habitants des salons et des champs ». Mais même cette variété, malgré sa dimension utilitaire, n’a pas échappé, avec un temps de retard, aux modifications : l’auteur atteste qu’elle a « récemment dégénéré », y compris dans le voisinage de Blenheim ; la gravure d’un Blenheim spaniel incluse dans son ouvrage montre d’ailleurs un crâne arrondi et un museau court. Selon l’auteur Richard Leighton (Dogs and All about Them, 1910), les petits Spaniels se démocratisent au cours du XIXe siècle, puisqu’on en trouve alors aussi parmi les classes laborieuses londoniennes. L’ancien type y est également une rareté : Leighton rapporte que le propriétaire d’un sujet à museau long aurait refusé de le vendre même pour la forte somme de 250 £.

C’est donc sous la forme à face plate que les petits épagneuls anglais intègrent le concert cynophile ; le Toy Spaniel Club est créé en 1885. Ce sont de très petits chiens : les auteurs cynologiques indiquent alors qu’un poids de 2,3 à 4,5k est courant, et certains sujets d’exposition pèsent à peine plus que 2kg, ce que Leighton critique : « la folie moderne pour les petits spécimens les rend quasi impropres à la reproductionUne lice ne devrait pas peser moins de 4 kg, et plus est même préférable. » Le nom de King Charles est retenu pour désigner le noir et feu (le coloris alors majoritaire), Blenheim pour le blanc et orange, Ruby pour le fauve unicolore, Prince Charles pour le tricolore, dans une tentative pour créer quatre cheptels raciaux différents. Mais le club y renonce, et à sa demande le Kennel Club réattribue en 1903 l’appellation King Charles Spaniel à toute la race. Une des plus importantes éleveuses du début du XXe siècle est Judith Blunt, comtesse Neville-Lytton (Saint Anthony), qui publie un ouvrage sur les chiens nains (Toydogs and their ancestors, 1911).

Roswell Eldridge,

Roswell Eldridge,

Entre ensuite en scène Roswell Eldridge, un homme d’affaires américain, maire de Saddle Rock (état de New-York), et amateur de Toy Spaniels. Visitant l’Angleterre, il est déçu de ne voir aucun sujet présentant le type nosey (avec du nez) qu’il admire sur les anciens tableaux. Il propose donc, dans le cadre de la prestigieuse exposition Cruft’s, un challenge pour tenter de le faire revivre : à partir de 1926, il offre pour cinq années de suite un prix de 25 £ pour le mâle et la femelle qui se rapprocheraient le plus du type que décrit le catalogue de l’exposition : « Bleinheim Spaniels de l’Ancien Type, comme observés sur les images du temps de Charles II, face longue, pas de stop, crâne plat non incliné en dôme, spot au milieu du crâne. » Une photo d’un tableau d’Edwin Landseer de 1845, The cavalier’s Pets, est jointe au catalogue de 1927 à 1930.

Au début les éleveurs de King Charles, attentifs au contraire à la sélection de nez courts, ne prennent guère ce concours au sérieux. En 1926 les deux seuls inscrits, Ferdie of Monham à Mrs Treleaven, et Flora à Mrs Raymond-Mallock, gagnent le prix. En 1927, la gagnante est Waif Julia, à Amice Pitt, une éleveuse réputée de Chow-Chow, qui avait acheté cette chienne en 1924.

Cette victoire l’amène à se consacrer, sous l’affixe Ttiweh, qu’on retrouve à la base du cheptel moderne, à la renaissance de l’ancien type ; elle gagne le prix en 1928 avec Hentzau Sweet Nell ; le vainqueur en mâle est Ann’s Son à Miss K. Mostyn Walker, gagnant aussi des éditions 1929 et 1930

Lors de la Cruft’s 1928, le cavalier King Charles Spaniel Club est fondé par les pionnières de la nouvelle race, K. Mostyn Walker, Amice Pitt, Katie Eldred (Turnworth), Jeanne Harper Trois-Fontaines (de Fontenay) ; Roswell Eldridge, décédé juste un mois avant, n’aura pas vu le couronnement de son entreprise. Le nom de cavalier choisi pour se différencier du King Charles est inspiré du titre du tableau de Landseer et contient une référence historique : cavaliers étaient le nom donné aux partisans du roi Charles Ier, alors que ceux du Parlement étaient surnommés Roundheads (têtes rondes) à cause de leur coiffure stricte de calvinistes, très éloignée des longues perruques poudrées portées par les nobles ; et comme c’est bien une tête ronde qu’arbore le type à face plate, ce nom de cavalier paraît finement choisi.

Histoire du Cavalier King Charles

Le club rédige un standard, basé sur Ann’s Son, étalon fondateur du cheptel moderne. C’est un Blenheim de 6 kg, qui aurait été produit involontairement par Miss Mostyn Walker à partir de deux King Charles à nez court, Lord Pindi et Ann ; la portée ne contenait que deux chiots, Ann’s Son et le tricolore Wizbang Timothy, utilisé aussi à la reproduction. Certes, il est tout à fait vraisemblable qu’au sein du cheptel des King Charles, pouvaient naître certains sujets tirant vers l’ancien type, comme en attestent les gagnants du challenge Eldridge. Mais les éleveurs de King Charles, considérant généralement à l’époque que reformer le spaniel nain originel était une démarche rétrograde, ne se seraient guère empressés pour mettre à disposition de l’expérience leurs produits les moins typés. Cette difficulté même et certains autres éléments ont fait supposer l’apport d’autres races : retour rapide au nez long et à des poids plus importants que les King Charles en faveur à l’époque, crâne plat et chanfrein bien allongé de certains premiers cavaliers tel Ann’s Son, doutes sur l’ascendance de ce chien. Ainsi, même si l’usage de la consanguinité a permis au type souhaité pour le cavalier de se fixer rapidement, il est bien possible que des spaniels divers et l’épagneul nain continental aient apporté leur contribution (voir encadré Complément d’enquête). 

Le Kennel Club, sollicité à plusieurs reprises par le cavalier King Charles Spaniel Club, accède enfin à son souhait en 1945 et reconnaît la race ; jusque-là, les nez longs étaient enregistrés comme « King Charles type cavalier ». La première exposition du club se tient en 1946, jugée par l’éleveuse Mrs Jennings (Plantation). Lors de l’officialisation de la race, Mrs Pitt, Eldred et Harper Trois-Fontaines se rendent au Kennel Club et entreprennent d’identifier dans le stud book les King Charles connus pour avoir un type plutôt cavalier ; la liste établie inclut aussi des King Charles réputés produire des sujets nosey. Pendant plusieurs années il sera autorisé d’apparier un cavalier à un King et d’enregistrer les chiots en tant que croisés ; après trois générations d’accouplements entre ceux-ci et des cavaliers, leur progéniture pouvait réintégrer le stud book. Ce qui a permis de pallier aux inconvénients de la consanguinité élevée qui régnait dans la race depuis sa formation
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Daywell Roger à Jane Pitt Bowlder.

Daywell Roger, petit-fils d’Ann’s Son, produit par le Lt Col. et Mrs Brierly, est en 1948 le premier champion et un raceur important pour le renouveau du cheptel d’après-guerre, contribuant à fixer le type car ce chien a bien l’apparence de la race actuelle. Après le décès d’Amice Pitt en 1978, sa fille Jane Pitt Bowlder, propriétaire de Daywell Roger, reprendra sa lignée. Parmi les éleveurs importants ayant emergé à la fin des années 1940 et dans les années 1950, citons Mrs Pilkington (of Hillbarn), Mrs Murray (of Crustadele), Miss Mayhew (Mingshang), Mrs Green (Heatherside), Mrs Keswick (Pargeter), Miss Turle (of Sunninghill), lady Forwood (of Eyeworth). 

Rowley avec la princesse Margaret et son mari lord Snowdon.

La race commence à gagner en notoriété lorsque la princesse Margaret (sœur d’Elisabeth II) acquiert dans les années 1960 un spécimen nommé Rowley, et quand Amelia of Laguna, à Mrs Cryer, gagne en 1963 le groupe des Toys à la Cruft’s. 

Alansmere Aquarius.

La consécration arrive lorsqu’en 1973, Alansmere Aquarius, aux éleveurs Halls et Evans, remporte à 17 mois le Best In Show. Les effectifs du cavalier King Charles, laissant loin derrière ceux du cousin King Charles, vont monter en flèche, et la race s’installer dans son pays dans une popularité bien méritée.